Un pied puis l'autre
SUR LA PLAGE ABANDONNÉE
C'en est presque indécent de beauté et de coolitude.
Camille est une véritable sirène, elle a la plage dans le sang et dans la peau.
En ce qui me concerne, je ressemble plutôt à Mercredi Addams. Je cultive mon teint d'aristocrate du XIXe. Mais moi, je le vois, j'ai bronzé, mon sein est plus blanc que mon décolleté! En tout cas j'ai bien meilleure mine qu'à Caen...
Camille m'a grillée en train de regarder ma montre avec l'air horrifié de "il n'est QUE 17h!". Du coup, j'ai fait la sieste.
Mais je progresse. Je lâche.
En même temps notre niveau de stress est maigre:
Un chien a mangé nos chaussures (hum, de la bonne petite vachette allemande de Birkenstock); j'ai trouvé des tongs moches qui me filent des ampoules.
Et on a fait une sieste pile sous un cocotier, sans faire gaffe. C'eût été con de mourir ainsi, le crâne explosé par une noix de coco.
Que d'aventures...
L'océan est impressionnant, puissant comme une machine à laver ultra-performante; des vagues vers la plage, des vagues vers le large, des vagues latérales... C'est massage anti-cellulite quand la vague arrive puis projection-gommage de la face postérieure puis ressac-peeling de la face antérieure. C'est marrant comme un manège.
Ma chère Camille G., après les tortues corses, j'en ai vu des locales.
Ici, c'est LA tortue, élevée en anglais au grade de “she” plutôt que “it”.
N• 1, qui laborieusement allait dans l'océan après avoir pondu (en même temps, quand on vit un siècle, pourquoi se presser?).
N•2, qui creusait son nid; on attendait; un monsieur nous disait "she is still digging digging" en imitant avec ses bras une tortue qui creuse. Ridicule. Et puis non, ça ne lui a pas plu, elle a pas pondu.
N•3, qui remontait vers la plage pour pouvoir "digging digging" à son tour.
Pas toujours passionnant mais je conserve une indéfectible fascination pour ces étranges créatures.
Et ce soir-là, le ciel…
Jamais vu ça.
Juste jamais.
Cinq étoiles filantes.
Un voeu.
Peaufiné et précisé.
Faudrait pas envoyer n'importe quels mots dans la voie lactée.
SEA, SWANN & SUN
"Longtemps, je me suis couché de bonne heure."
Ça y est, c'est parti j'attaque, volume 1 sur sept "Du côté de chez Swann". Proust est très bien pour la plage. Si si. On pourrait croire que cagnard rime avec polar, mais je dois avoir un côté intello bien ancré, je suis très heureuse d'avoir le temps de cerveau disponible pour lire ce qui ne peut pas rentrer dans ma caboche le reste de l'année.
J'aime bien, c'est beau et assez planant, ce côté fleuve; il devait être bien perché le bonhomme. Preuve en est, il y a une description incroyable d'asperges, vraiment.
On nous fait peur en faisant de certains auteurs des monuments écrasants, mais en fait, ça va! Bon, de là à lire les sept volumes d'affilée... on a le droit d'étaler, non? Une chose est sûre, c'est pas Marcel qui m'apprendra la concision littéraire.
J'avais pensé lire "À la recherche du temps perdu" le jour où je serai en congé maternité. C'est pas vraiment encore prévu au programme alors je modifie mes plans. Et puis franchement, un enfant nourri au Proust intra-utérin, je ne suis pas sûre que ça soit très sain.
Eh dites-donc, le fameux passage de "LA Madeleine de Proust" dont tous les gens cultivés parlent: "ah oui et blablabla..." Heu, excusez-moi mais c'est dans le premier chapitre. Pff, trop facile .
(J'ai une phrase pour les Tête Haute; après le défi de "c'est fou qu'il te faille", j'ai mieux: " sans que je susse pourquoi" ou "qu'elles reflétassent exactement ce que j'apercevais").
L’AVENTURIER DE CEYLAN ET PAS D’INDOCHINE
Galle.
Petite ville fortifiée. Charmante, tranquille, bucolique. Presque muséale.
À l'extérieur des remparts, magie des murs de pierre, une ville nouvelle mais de taille modeste, assez bordélique, bruyante et surchauffée.
J'ai rencontré mon énergumène aventurier du voyage.
Celui de l'année dernière au Cambodge était bien fracassé, faisant sa pause sans bière de 3h à 10h du matin. Mais on avait passé presque deux jours marrants.
Celui de cette année est beaucoup plus structuré, même tout à fait sain, c'est juste que sa vie ressemble à une partie de ping-pong. On pourrait le croire mythomane mais non, sa vie est simplement un roman d'aventures (ce dont il a tout à fait conscience). On pourrait le croire mégalomane mais non, il s'intéresse vraiment aux autres.
Je l'ai rencontré au café le matin. Je l'ai retrouvé avec Camille pour l'apéro.
Photographe (David, regarde "Ahmed Mokhrar" - j'ai pas tout vu mais je pense que ça peut te plaire).
Dans le désordre:
Le Caire, photo, Paris, ayurvéda, Costa Rica, Sotheby's, les possédés, pensionnat suisse, dèche, Égyptair, bougies aux huiles essentielles, argent, Paris XVIIIe, Leica, Paris XVIe, désert, fils Égypte, fils Costa-Rica, noir et blanc, Sri Lanka.
Ça l'a fait beaucoup rire de rencontrer une vraie petite titi parisienne au Sri Lanka. "On t'a déjà dit que tu ressemblais à Arletty, avec ta voix et ton allure?" Oui, en effet… mais ai-je une gueule d'atmosphère?
ROOM 237
Mount-Lavinia, banlieue balnéaire de Colombo. Assez moche. Plage un peu cracra, population de la classe moyenne-élevée sri lankaise et expats. Ça a des airs de station thermale désaffectée d'ex-URSS (devant l'océan indien).
Camille y a un entretien avec la dirigeante d'une ONG qui gère des situations de post-conflit et/ou post-catastrophe (ici donc guerre plus tsunami); comment permettre aux individus de se réintégrer et d'acquérir les connaissances nécessaires à une reconstruction sociale au sein de leurs collectivités (c'est dit grossièrement mais, moi, j'ai pas de doctorat). Je la vois avoir le trac. Je la vois super bien gérer l'entretien. C'est vraiment intéressant. Elle est forte ma soeur!
Hôtel étonnant. Tout est tout vieux dedans. Mais la déco hétéroclite dans l'esprit grand-mère est rigolote. Le lieu pourrait faire peur mais le monsieur de l'hôtel est absolument charmant. On décide de regarder un film d'horreur, c'est le bon endroit pour. On regarde Saw. C'est nul et marrant. La connexion internet est aléatoire, la location du film coince à 14 min de la fin. Tant pis.
J'adore ce genre d'étape improbable en voyage, ça a beaucoup de charme.
KANDY, C’EST FINI (...), JE NE CROIS PAS QUE J’YRETOURNERAI UN JOUR
Phrase d'accroche, vous saurez pourquoi plus tard.
(Et pourtant Gérald, j'ai suivi ton conseil, nous n'y sommes pas pendant l'Esala Perahera).
Je vous salue tous bien bas, et même plus, je vous embrasse.
Valentine